Compétence du juge des loyers et clause d’adhésion à une association de commerçants

16.01.2019
Affaires Publiques

Veille juridique : des jurisprudences inédites et éclairantes

La Cour d’Appel de Paris vient de se prononcer pour la première fois sur la compétence du juge des loyers commerciaux dans le cas d’un loyer binaire. Par ailleurs, la Cour de Cassation confirme qu’une clause d’adhésion forcée d’une association de commerçants est nulle et de nullité absolue, comme étant contraire aux droits fondamentaux.

 

I – ARRET DE LA COUR D’APPEL DE PARIS DU 24 OCTOBRE 2018 SUR LA COMPETENCE DU JUGE DES LOYERS COMMERCIAUX EN PRESENCE D’UN BAIL COMPORTANT UN LOYER BINAIRE

La société locataire HENNES & MAURITZ contestait la compétence du juge des loyers commerciaux pour la fixation d’un loyer de base en renouvellement, compte-tenu du fait que le bail se composait d’un loyer binaire.

Le juge des loyers commerciaux du Tribunal de Grande Instance de Bobigny s’était déclaré compétent et la société H&M avait interjeté appel à l’encontre de cette décision.

Le Cour indique, par un attendu extrêmement clair :

 » En l’espèce, les parties n’ont fait qu’user de leur liberté contractuelle en décidant de soumettre au juge compétent la fixation de leur loyer de base car la stipulation selon laquelle le loyer d’un bail commercial est composé d’un loyer minimum et d’un loyer calculé sur la base du chiffre d’affaires du preneur, n’interdit pas, lorsque le contrat le prévoit, de recourir au juge pour fixer, lors du renouvellement, le minimum garanti à la valeur locative.

 » La clause litigieuse doit en conséquence recevoir application.  »

Cet arrêt, particulièrement bien ciselé, est très important car c’est la première fois que la Cour d’Appel de Paris se prononce sur la question de la compétence du juge des loyers commerciaux en présence d’un loyer binaire, à la suite des arrêts de la Cour de Cassation du 3 novembre 2016 (n° 15-16826 et 15-16827), qui avaient eux aussi, en censurant les décisions de principe de la Cour d’Appel d’Aix en Provence en date du 15 février 2015, reconnu la compétence du juge des loyers commerciaux.

On notera que depuis les arrêts de la Cour de Cassation du 3 novembre 2016, la Cour d’Appel de Lyon, sur renvoi après cassation, avait adopté la position de la Cour de Cassation (arrêt du 28 juin 2018, 3° Ch. A, n° 16/09606).

En revanche, une autre Cour d’Appel, en l’occurrence la Cour d’Appel de Versailles (12ème Ch., n° 16/03805), faisait de la résistance aux jurisprudences de la Cour de Cassation.

Ainsi, par un arrêt rendu par la 12ème chambre le 19 septembre 2017, la Cour d’Appel de Versailles considérait que le juge des loyers n’était pas compétent pour statuer sur le montant du loyer de base en renouvellement en présence d’une clause de loyer binaire.

Cet arrêt a été déféré à la censure de la Cour de Cassation.

L’affaire est actuellement en délibéré et la Cour de Cassation ne devrait pas tarder à faire connaître sa décision.

Lire l’arrêt en version pdf

 

II – NULLITE DES CLAUSES D’ADHESION FORCEE D’UNE ASSOCIATION DE COMMERCANTS : CONSEQUENCES

La Cour de Cassation par un arrêt récent (Cass. 3° Civ., 11 octobre 2018, n° 17-23211), publié au Bulletin, rappelle une nouvelle fois, conformément à la jurisprudence constante, qu’une clause d’adhésion forcée d’une association de commerçants est nulle et de nullité absolue, comme étant contraire aux droits fondamentaux résultant des articles 11 et 13 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme et des Libertés et à l’article 4 de la loi du 1er juillet 1901 sur la liberté d’association (Cass. 3° Civ., 12 juin 2003, pourvoi n° 0210.778).

Dans la nouvelle décision commentée, la Cour de Cassation confirme cette jurisprudence.

Bien plus, la clause du bail critiquée par le preneur précisait qu’en cas de retrait de celui-ci de l’association des commerçants, il restait néanmoins tenu au règlement de sa participation financière aux dépenses engagées pour l’animation et la promotion du centre commercial.

La Cour d’Appel avait considéré que cette clause entravait la liberté du preneur de ne pas adhérer à une association de commerçants et de se retirer de l’association au moment il le souhaitait et que dès lors, une telle clause étant entachée de nullité absolue, ne pouvait recevoir application de quelque manière que ce soit.

De ce fait, la Cour d’Appel avait conclu que les demandes de paiement faites par l’association après que le preneur ait cessé d’adhérer à l’association, devaient être rejetées.

La Cour de Cassation rejette le pourvoi.

Ainsi, pour la première fois, les clauses nouvellement rédigées des associations de commerçants précisant qu’en cas de retrait de l’association du preneur, celui-ci restait néanmoins tenu de régler une participation financière à l’association, ne peuvent avoir aucune conséquence, dès lors que la clause elle-même est nulle et de nul effet.

Lire l’arrêt en version pdf.

Devenir adhérent de la Fédération des Acteurs du Commerce dans les Territoires
Top Aller au contenu principal